Un monde idéal où les produits chimiques sont fantastiques

L’adolescent força ses foulées lorsqu’il aperçut la façade
délabrée de l’ancienne usine chimique se découper sur la ligne d’horizon. Le groupe de Brian n’oserait jamais le pourchasser là-bas. Il força la vieille porte en fer mangée par la rouille, se
jeta dans les ténèbres et grimaça en constatant que les garnements avaient déposé leurs vélos pour continuer la traque dans le bâtiment insalubre.

— On aura ta peau ! beugla Victor sur ses talons. Je vais t’apprendre à embrasser ma petite sœur !

Sa voix faisait écho dans la structure. L’adolescent slaloma entre les bidons où les matières chimiques poisseuses s’échappaient en une sorte de mousse violette et monta une volée de marches en
fer blanc. Alors qu’il courait sur la passerelle, Victor lança son poing en avant, droit dans les vertèbres. L’adolescent cria, se cabra, glissa et dévissa, directement dans un bassin où un
fluide visqueux orange fluo stagnait.

Les poursuivants se dispersèrent immédiatement.

L’adolescent mit plusieurs heures à se dégager. Il avait avalé un peu du liquide nauséabond, et déjà, une étrange irradiation saisissait ses membres. Comme une nouvelle force vitale qui
empreignait peu à peu son être pour faire de lui quelqu’un d’autre… Un être exceptionnel… Un super-héros. 

Trois jours plus tard, il mourrait des suites d’une leucémie foudroyante, de deux tumeurs au cerveau, et d’un empoisonnement du sang.

Dans un monde idéal…