Un monde idéal où un cinéaste raté enflamme le monde

 

Le réalisateur occidental retira sa casquette graissée par la transpiration et se gratta le front. Il sentait bien les limites de son œuvre : le regard de l’Imam violant le petit garçon avec un Coran n’était pas assez intense, l’explosion d’un Mahomet soûl au milieu d’une foule de juifs n’était pas assez visuelle, les hordes de fanatiques religieux ne semblaient pas assez investies, la dénonciation des mosquées comme lieu de débauches sur des femmes voilées n’était pas assez vive.

Mais peu importe, se résigna-t-il en cliquant sur le bouton « diffuser » sur Youtube. Les gens ne s’attarderaient pas sur ces défauts mineurs. Son chef-d’œuvre marquerait les esprits.

 

Deux jours plus tard, une version sous-titrée du film fit son apparition dans les médias du monde arabe. La colère monta. Quatre jours plus tard, des rassemblements spontanés éclatèrent un peu partout. Une semaine plus tard, ils se muèrent en protestations exhortant les dirigeants à agir. Dix jours plus tard, lorsque la situation devint intenable, les représentants du monde arabe se résignèrent à se rendre en occident.

Ils firent part de l’indignation de leurs citoyens descendus en masse dans les rues, choqués par les conditions de précarité des réalisateurs occidentaux. Ils firent part de leur consternation face à la caricature sans intelligence, aux acteurs minables, au scenario prévisible, aux effets spéciaux ridicules et à la photographie sans âme. Ils interpellèrent sur la splendeur passée d’Hollywood. Pourquoi ne réalisaient-ils à présent que des navets ? Comment avaient-ils pu laisser le septième art se dégrader à ce point sur un prétexte de crise économique ? Finalement, ils offrirent des financements, des cargaisons de matériels audiovisuels neufs, ainsi que l’aide humanitaire de scénaristes et réalisateurs musulmans pour que cette tragédie ne puisse jamais se reproduire.

Jamais.

 

Dans un monde idéal…

 

 

Je dédicace cette nouvelle aux terriens, ce formidable peuple qui arrive à s’autodétruire pour un navet mal réalisé qui ferait honte à Uwe Boll. Cela ne vous rappelle rien ? Mais si, l’affaire du Coran brûlé il y a un an jour pour jour ! J’en parlais ici, d’ailleurs 🙂

 

 

5 réflexions au sujet de « Un monde idéal où un cinéaste raté enflamme le monde »

    • « Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais, en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue » Albert Einstein

      Elle s’adapte plutôt bien au contexte 🙂

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